Les islamistes ont fait leur marché électoral et aux Européennes, ils votent pour… <!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Europe
Le CCIE a comparé le programme des candidats aux européennes sur des points précis.
Le CCIE a comparé le programme des candidats aux européennes sur des points précis.
©Ludovic MARIN / AFP

Intentions de vote

Le CCIE (Collectif Contre l’Islamophobie en Europe qui a succédé au CCIF dissous par le ministère de l'Intérieur) a mis les différents programmes au banc d’essai et voilà sa conclusion.

Mohamed Sifaoui

Mohamed Sifaoui

Mohamed Sifaoui est journaliste, écrivain et réalisateur. Il est l'auteur de plusieurs reportages et ouvrages sur les milieux islamistes radicaux.

Voir la bio »

Véronique Reille Soult

Véronique Reille Soult est présidente de Backbone Consulting, spécialiste de la gestion de crise et de l'analyse de l'opinion. Elle a notamment publié "L'ultime pouvoir - La vérité sur l'impact des réseaux sociaux" (2023) aux éditions du Cerf.

Voir la bio »

Atlantico : Comme à chaque période électorale, le CCIE (le Collectif contre l’islamophobie en Europe) a étudié le positionnement des candidats aux européennes qui soutiennent le mieux leurs objectifs. LFI et EELV arrivent en tête de leur classement. Quel est ce collectif ? Quelles sont leurs conclusions ?

Mohamed Sifaoui : Ce groupement, le CCIE, est constitué de ce que j'appelle les rebuts de l'ex-CCIF, l’organisation islamiste née pour instrumentaliser les combats antiracistes et qui considérait que toute critique contre les mouvements islamistes ou même à l'égard des textes religieux serait assimilable à un acte de racisme, ce qui est évidemment faux. Après la dissolution du CCIF, sur des fondements juridiques qui ont clairement été reconnus par la Justice, le CCIF avait épuisé tous les recours juridiques que lui offrait l’Etat. Il a été clairement établi que la logique séparatiste du CCIF était accompagnée d'un discours qui était susceptible de provoquer un trouble à l'ordre public, parce que ce discours du CCIF avait vocation à chercher la fragmentation de la société française et en instrumentalisant notamment les musulmans, les plus jeunes, les plus vulnérables, les moins éduqués et les moins conscients des réalités et des enjeux.

Ce groupement s'est reconstitué, notamment sur Internet et à travers les réseaux sociaux en Belgique, pour continuer à mener son travail de sape contre la démocratie et la République. Un nouveau groupe a émergé, le CCIE (le Collectif contre l’islamophobie en Europe).

Ce qu'ils font aujourd'hui vise évidemment cet objectif. En lisant la littérature islamiste, il est possible de découvrir de façon explicite les objectifs de la stratégie qui est à l’œuvre. Les islamistes à travers leurs textes et leurs actions cherchent à faire monter les extrêmes droites en Europe. Les islamistes considèrent que plus l'extrême droite sera importante, plus l'extrême gauche, qui est leur alliée, sera importante. A travers cette polarisation de la vie politique en Occident, les islamistes rêvent de fragmenter les sociétés européennes en les amenant vers des logiques quasiment de guerre civile. Nous sommes dans des logiques de guerre civile idéologique.

Cela rejaillit sur la classe politique. L’attitude, qui est portée notamment par Jean-Luc Mélenchon et LFI, autour d'une guerre de tous contre tous, s'appuie sur les réseaux islamistes et non pas sur les réseaux musulmans. En réalité, les musulmans ne sont pas constitués en réseaux. Les musulmans sont globalement intégrés et dans leur diversité ils votent de façon différente, à l'image de la société française.

Concernant l’analyse du CCIE sur les candidats aux européennes, LFI et EELV cochent toutes les cases sur la reconnaissance de l'islamophobie, de l'opposition aux mesures de dissolution des associations et sur le soutien d'un cessez-le-feu à Gaza. Est-ce qu’à travers cette publication, le CCIE incite les électeurs de confession musulmane à voter LFI et EELV et à peser sur les élections européennes du 9 juin prochain ?

Mohamed Sifaoui : Le CCIE et les islamistes souhaiteraient faire exister un électorat musulman. Ce fantasme de l'électorat musulman n'existe paradoxalement que dans l'esprit de deux tendances idéologiques d'ailleurs antagonistes l'extrême droite et l'extrême gauche. Ce sont les deux courants qui considèrent que les musulmans pourraient constituer un groupe homogène et monolithique. Je considère qu’il n'y a pas plus raciste que de considérer que la communauté nationale serait diverse et que seuls les musulmans seraient comme un troupeau constitué en un groupe monolithique.

Dans le récent baromètre sur les intentions de vote de l’Institut Harris Interactive x Toluna, 38 % des musulmans voteraient pour la FI. Cette lecture du sondage est très orientée même si je ne remets pas en cause cette étude.

Ce sondage confirme le message que je porte depuis plusieurs années. Malgré les tentatives d'instrumentalisation par les mouvements islamistes et par La France insoumise du discours victimaire, malgré les politiques communautaristes qui sont menées, malgré la ghettoïsation, il y a 62 % des musulmans qui ne votent pas pour la France Insoumise. Il y a deux façons de voir ce sondage. Il y a une manière qui arrange forcément les extrêmes. Cela consiste à considérer qu'un tiers des musulmans voteraient pour ceux qui les draguent.

Mais il y a une autre lecture qui est la plus inquiétante. De manière plus générale, plus de 50 % des Français votent pour des extrémistes, à l’extrême gauche ou à l'extrême droite. Plus de la moitié de la société française s'éloigne du cadre républicain. Ce constat est beaucoup plus alarmant que 38 % des musulmans qui voteraient pour la liste LFI aux européennes.

30 à 40 % des musulmans sont séduits par le discours islamiste. Parmi eux, la République peut récupérer 10 à 15 % d’entre eux. Les autres partis politiques républicains pourraient récupérer ces électeurs par un discours beaucoup plus cohérent et beaucoup plus pédagogique. Jean-Luc Mélenchon et les représentants de LFI ne font rien d'autre que l'instrumentalisation politique.

Alors que nous sommes dans un cadre de campagne pour les européennes, La France insoumise a fait le choix d’instrumentaliser le conflit au Proche-Orient entre Israël et le Hamas.

Malgré ce contexte passionné, les musulmans globalement ne votent pas pour La France insoumise. L’électorat en réalité s'éloigne de plus en plus. Il y a un rejet qui s'installe au sein de la communauté nationale contre LFI.

La France insoumise a placé toute sa propagande autour de la récupération, très malsaine au demeurant, des conséquences et du drame de l’après 7 octobre. Cette instrumentalisation est à l’œuvre dans le cadre de la campagne des élections européennes. Mais cette volonté d'instrumentaliser les musulmans ne prend pas.

La publication de ce classement par le CCIE démontre que les islamistes soutiennent le discours islamo-gauchiste de La France insoumise et d'Europe Ecologie Les Verts.

Quel est le niveau d'entrisme de certaines personnalités politiques qui se prêtent au jeu des islamistes ? Est-ce que des personnalités comme Jean-Luc Mélenchon et LFI se prêtent à ce jeu-là ? Est-ce que certains candidats sont plus dans une forme de naïveté et se font piéger par les réseaux islamistes ?

Mohamed Sifaoui : Il y a très peu de naïveté dans le monde politique. Il y a plutôt de mauvaises lectures et des moments qui font que certains candidats se retrouvent du mauvais côté de l'histoire. Cela concerne certains de nos partis de gauche. Il faut rappeler que cette dérive n'est pas récente. Elle vient de très loin. Je l'observe depuis au moins une vingtaine d'années. Il y a en France, dans les milieux de gauche, une tentation d'aller chatouiller les islamistes pour essayer de s'accaparer des voix. Or, il se trouve que cela ne marche pas pour la campagne des européennes. Cela marche dans un seul cas, dans le cadre des élections locales, dans des lieux ghettoïsés. Cela marche de façon catastrophique dans les scrutins locaux puisque, en raison de politiques clientélistes, certains maires de gauche se font élire et réélire mais laissent derrière eux un champ de ruines. Certains de nos quartiers, à cause de ces dirigeants politiques de gauche, sont dans un état lamentable.

Le fait que cette stratégie soit totalement assumée est novatrice en revanche. Certaines figures politiques ont adhéré de manière pleine et entière et se sont alignées sur les visées, les agendas islamistes et le narratif islamiste. La France insoumise est la formation politique qui reprend le narratif du Hamas. LFI est le parti qui reprend au mot près quasiment le narratif des antisémites. Jean-Luc Mélenchon s’est notamment illustré avec sa presque condamnation du crime antisémite qui a eu lieu à Rouen et qui a visé une synagogue. Son message, qui condamnait cette agression, a mis en évidence une sorte de parallèle avec ce que vivraient aujourd'hui les musulmans.

Même s’il n’est pas possible de nier l'existence du racisme et de propos ou d'attitudes discriminantes (qu’il faut combattre), il faut admettre, par honnêteté intellectuelle, que cela n'a absolument rien à voir avec ce que vit et ce que subit la communauté juive depuis déjà quelques années et à fortiori depuis le 7 octobre.

Des chiffres sont donnés par nos institutions, notamment par le ministère de l'Intérieur, qui évoquent clairement ceci et qui permettent d'avoir un panorama de la réalité du racisme en France.

Le jeu de Jean-Luc Mélenchon est de reprendre le narratif du Hamas. Le représentant de La France insoumise est dans une fuite en avant. Il refuse de faire marche arrière. Cette attitude va provoquer la triste fin politique de ce triste personnage. Il est en train de sombrer.

Le nouveau baromètre d’intentions de vote de l’Institut Harris Interactive x Toluna pour Challenges, M6, RTL a été dévoilé. Ce sondage s’est notamment intéressé aux électeurs musulmans. Quels sont les principaux enseignements de cette étude ? Quelles sont les formations politiques les plus plébiscitées par le vote des électeurs musulmans ?

Véronique Reille-Soult : Sans grande surprise la liste LFI est largement devant les autres listes auprès de l’électorat. Cela ne s’explique pas uniquement par leur position dans le conflit israélo palestinien et leur dénonciation de la situation à Gaza.  C’est aussi la reconnaissance de l’islamophobie dont de très nombreux musulmans se sentent victimes.

Quels sont les thèmes qui comptent le plus aux yeux des électeurs musulmans dans leur choix de vote, selon cette étude ?

Véronique Reille-Soult : Toutes les prises de paroles qui permettent aux musulmans de se sentir reconnus et protégés sont importantes pour cette communauté. Pour autant, les thèmes qui les concernent et les mobilisent sont les mêmes que pour le reste de la population française. Ils sont d’abord préoccupés par le pouvoir d’achat et la santé.

En sachant que cet électorat est l’un des plus abstentionnistes (42% à la présidentielle 2022), les insoumis ne représentent pas plus d’un musulman sur cinq. Les résultats de ce sondage ne démontrent-ils pas que la stratégie de LFI et de EELV vis-à-vis de l’électorat musulman est un échec ?

Véronique Reille-Soult : On ne peut parler d’échéance à ce stade, les élections n’ont pas eu lieu. Mais il est certain que l’enjeu de LFI aujourd’hui est de mobiliser cet électorat. Les inciter à aller voter en utilisant des arguments classiques comme « ne laissez pas les autres décider pour vous » mais surtout en les interpellant sur leur « l’injustice de traitement » qu’ils ont le sentiment de subir.

Le CCIE, une association controversée, a fait le point sur les candidats aux européennes qui soutiennent le mieux ses objectifs, sur le voile et l’islamophobie notamment. LFI et EELV sont en tête. En quoi cela peut-il nuire à l’image de LFI et de EELV auprès de l’électorat musulman ?

Véronique Reille-Soult : La position de cette association est effectivement très controversée, y compris dans la communauté musulmane. Pour autant ce sondage permet de poser des points sur lesquels l’engagement de LFI est connu et reconnu. Cela les conforte donc comme un parti soutien des musulmans, même si les questions posées dans ce sondage ne sont pas des préoccupations partagées par tous, et certainement pas un motif de vote aux européennes.

Au regard de l'étude qui révèle que 38 % des électeurs musulmans pourraient voter LFI aux européennes, est-ce que cela ne révèle pas l’échec de la stratégie de LFI qui court après les islamistes pour tenter d'obtenir les voix des musulmans ? Cette stratégie de l'entrisme n'éloigne-t-elle pas les musulmans qui pourraient voter pour LFI pour des raisons sociales ou pour une amélioration du pouvoir d'achat ?

Mohamed Sifaoui : L'analyse qui laisse croire que LFI rechercherait les voix des musulmans pour gagner des élections est une analyse qui est fausse. LFI sait très bien que, comptablement, le vote musulman, admettons qu'il existe, ne représenterait pas plus de 10 % du corps électoral. Il faut aussi savoir raison garder. Ce n'est pas avec 10 % du corps électoral, en se coupant de l'ensemble de la communauté nationale qu'il est possible de gagner des élections.

C’est d’ailleurs pour cette raison que La France Insoumise ne cherche pas à se rapprocher des démocrates musulmans. LFI ne cherche pas à se rapprocher des féministes de culture musulmane, ni des démocrates de culture musulmane. Ils cherchent vraiment les islamistes. En réalité, les islamistes peuvent être d'excellents compagnons de route pour La France insoumise et pour l'extrême gauche afin de créer le chaos. C’est ce que recherchent aujourd'hui Jean-Luc Mélenchon et ses camarades.

Jean-Luc Mélenchon souhaite créer véritablement les conditions de la mise en place d'une situation chaotique totalement dégradée, une situation de polarisation de la vie publique entre l’extrême gauche islamo-gauchiste et l'extrême droite. Jean-Luc Mélenchon a admis l'idée qu’il serait profitable pour lui aussi que l'extrême droite prenne le pouvoir en France. Cela radicaliserait incontestablement la société française et une grande partie des musulmans. Tel est le calcul de Jean-Luc Mélenchon, il espère être la première force d'opposition du pays et être celui qui pourrait tirer, de son point de vue, les marrons du feu en cas d'une véritable révolution. 

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !